L'estuaire
de la Loire
Qu'est
ce qu'un estuaire ?
L'estuaire est la portion de l'embouchure d'un fleuve
où l'effet de la mer ou de l'océan dans
lequel ce dernier se jette est perceptible. C'est une
zone de mélange des eaux douce et marine, où
se font sentir deux phénomènes concomitants
:
> La marée dynamique correspond à la
pénétration dans l'estuaire de l'onde
de marée, au passage de laquelle la surface de
l'eau est soumise à un mouvement vertical ascendant
puis descendant ;
> La marée de salinité pénètre
moins loin dans l'estuaire (le front de salinité
correspond à une dilution de 1% d'eau de mer
dans 99% d'eau douce).
Chaque estuaire possède un système physique
et écologique dynamique et unique, incluant zones
humides, méandres, deltas sans cesse remodelés
par les courants, des charges de matières en
suspension variables selon le contexte géologique,
climatique
Les estuaires ont une productivité biologique
particulièrement élevée, au point
d'être les milieux les plus productifs au monde.
L'estuaire
de la Loire
L'embouchure de la Loire est de type "estuaire
à barre" et sa géométrie est
définie par la nature des terrains dans lesquels
coule le fleuve. Après avoir traversé
le Massif Central, la Loire coule à partir d'Angers
dans une plaine sédimentaire, constituée
d'alluvions qui colmatent peu à peu l'ancien
lit rocheux. La forme des vallées est dictée
par la nature des roches et l'orientation des accidents
tectoniques et peut être divisée en 3 séquences
:
> Ponts de Cé - Pellerin : succession d'élargissements
et de resserrements
> Pellerin - St Nazaire : évasement en un
large triangle ouvert à l'ouest. Présence
de goulets étroits sur le lit devenu un chenal
unique du fleuve, en forme d'entonnoir.
> Aval de St Nazaire : delta sous-marin, lieu d'une
sédimentation vaseuse et sableuse.
Jusque
vers les années 1890, ce type d'estuaire a été
celui de la Loire. Il se caractérisait par une
sédimentation importance, avec un développement
de vasières, une grande largeur et une faible
profondeur. Les déplacements des chenaux sont
fréquents et les courants violents.
Le 20ème siècle a vu des travaux considérables
transformer radicalement la géométrie
du fleuve, avec notamment un abaissement du niveau des
basses eaux et de la ligne d'étiage. Différents
travaux ont été réalisés
dans l'estuaire :
> En Loire fluviale : épis pour former un
chenal unique et approfondi par les extractions de granulats
;
> En aval de Nantes : dragages, déroctages,
endiguements de sorte que les courants de jusant et
de flots emprunte le même chenal.
> Dans la liaison entre les parties fluviale et maritime
: creusement du bassin de marée.
Ces travaux ont fait de l'estuaire de la Loire un estuaire
de plaine, caractérisé par la réduction
de la superficie des vasières et le développement
des marais latéraux, ainsi que par la grande
profondeur du chenal.
Voir
la plaquette du GIP Estuaire, L'Estuaire,
cet inconnu.
Fonctionnement et dynamique
Les apports solides du fleuve se font sous trois formes
:
> Des sels minéraux dissous dans l'eau,
> Des matières en suspension, minérales
(diamètre inférieur à 0,5 mm) ou
organiques, en proportion variables selon la saison,
> Des éléments lourds (sables et graviers).
Dans la zone de rencontre des eaux, les courants diminuent
voire s'annulent, ce qui provoque l'agglomération
des particules sédimentaires (formation de flocons),
qui tombent au fond. La quantité de sédiments
ainsi piégés varie entre 0,5 et 1,5 millions
de tonnes. Cette masse très turbide est entretenue
et se déplace dans l'estuaire interne, suivant
le coefficient de marée et le débit de
la Loire. Elle prend successivement deux formes :
> Le bouchon vaseux
> La crème de vase.
Le
bouchon vaseux apparaît en périodes
de vives eaux : les étales sont de courte durée,
et les eaux fortement agitées par les courants.
La turbidité atteint 2 g/L en surface et 20g/L
en profondeur, mais chute très brutalement à
côté du bouchon. Dans le bouchon vaseux,
1 million de m3 de sédiments sont en mouvement
à chaque marée. L'apparition du bouchon
vaseux se fait de la manière suivante :
> étale de haute mer : eau calme pour
quelques minutes, la vase se dépose sur le fond.
Dans la zone de rencontre entre eau salée et
eau douce, on estime à 9 cm de vase le dépôt
apporté à chaque marée.
> marée descendante : le courant violent remet
en suspension la majorité de ce dépôt,
provoquant ainsi le bouchon vaseux. (8 cm des dépôts
précédents sont remis en suspension 2
fois par jour).
Cette remise en suspension intervient principalement
dans le chenal, les zones calmes (bras morts, etc.)
sont beaucoup moins concernées et donc se colmatent
peu à peu sous l'effet de la floculation des
argiles.
Le bouchon vaseux se déplace en fonction des
conditions hydrauliques dans l'estuaire. En été,
le débit moindre de la Loire permet une remontée
plus en amont des eaux salées, et donc le bouchon
se forme lui aussi plus en amont dans l'estuaire. La
moitié du temps, il est centré entre Donges
et Cordemais et s'étend de St-Nazaire à
Couëron, mais en raison du creusement du chenal
portuaire et de la création du bassin de marée,
il peut aujoud'hui mesurer de 15 à 40 km.
Désormais, il faut attendre des crues de débits
conséquents pour expulser le bouchon vaseux en
mer. En l'absence de crue, la concentration en MO du
bouchon augmente, et à chaque marée, il
fonctionne comme une machine à laver.
Les
conséquences du bouchon vaseux sont les suivantes
:
> La remontée de plus en plus fréquente
du bouchon vaseux et du front de salinité
jusqu'à Nantes a nécessité
de prélever l'eau pour l'alimentation de
la ville et du département 16km plus en amont
que précédemment ;
> Report de l'activité sédimentaire
vers l'amont : cela oblige à un dragage continu
des souilles le long des quais ;
> Dans les bras secondaires : le courant n'étant
plus assez fort, les dépôts non remis
en suspension aboutissent au colmatage complet en
quelques années ;
> Les vasières des anciens bras vifs sont
colonisées par des roselières ;
> Riche en MO, le bouchon vaseux nourrit des
bactéries qui consomment tout l'oxygène.
L'absence d'oxygène dans l'eau devient fatale
aux poissons qui traversent ce bouchon vaseux, et
ce d'autant plus que le volume du bouchon a été
multiplié par trois.
La
crème de vase se forme en période
de mortes eaux. Les courants atténués
et la durée accrue des étales favorisent
en effet le dépôt sédimentaire du
bouchon vaseux. Les turbidités sont de l'ordre
de 100 à 150 g/L, voire localement de 300 à
400 g/L. L'épaisseur de la crème de vase
est de 1 à 3 m, sur une longueur de 20 km, pour
un poids estimé à 100 000 T !
Dysfonctionnements
de l'estuaire
Depuis la fin du 19ème siècle, l'évolution
du trafic maritime, qui a nécessité une
adaptation des profondeurs du chenal navigable et l'extraction
de matériaux ont fortement modifié la
géométrie du fleuve et de son estuaire.
Cette évolution de l'estuaire se traduit par
les phénomènes suivants :
> L'abaissement de la ligne d'eau (-1.80m à
Ancenis, -3.50m à Nantes) a pour conséquences
l'assèchement de zones humides, des problèmes
de tenue des quais et des ponts, et la dégradation
des paysages ;
> Les courants sont plus forts, ce qui entraîne
une érosion des berges et la perturbation des
milieux ;
> Le déplacement de la salinité vers
l'amont ;
> Le développement du bouchon vaseux, qui
remonte davantage vers l'amont en période d'étiage.
Cela provoque la dégradation de l'exploitation
des marais, l'envasement des berges, la mortalité
de poissons par manque d'oxygène. Selon certains
experts, le bouchon vaseux aurait doublé de volume
depuis 1982.
Dans
le but d'apporter des réponses à cette
évolution, le Groupement
d'Intérêt Public Loire Estuaire
recherche des scénarios possibles d'intervention.
Les objectifs fixés pour ces scénarios
sont classés suivant ces thématiques
:
> Développement économique
> Développement urbain
> Environnement
> Aménités - fonctions identités.
La
Loire angevine et armoricaine
En
construction